1. Obstacles pour les victimes de violence domestique (ou VIF)
2. L’enquête
3. Avant le procès
4. Le procès
5. Procédures civiles
6. Médiation
Sources
Introduction
Bienvenue dans ce Module 4 concernant “L’accès à la justice”. Ce module aborde les défis auxquels sont confrontées les victimes de violence domestique dans leur quête de justice. Des premiers obstacles aux procédures judiciaires complexes, ce module explore les aspects critiques qui sont importants pour l’accès des victimes à la justice.
En outre, le module 4, aborde les enquêtes, les préparations au procès, les procédures judiciaires, les procès civils et le rôle de la médiation en tant que mode alternatif de résolution des conflits.
Objectifs d’apprentissage
+ Identifier les obstacles personnels, sociaux, culturels, sociétaux et juridiques auxquels se heurtent les victimes
+ Sensibiliser aux responsabilités des professionnels de la justice
+ Améliorer les normes en matière d’enquête, de collecte de preuves, de protection et de poursuites judiciaires
+ Faciliter l’accès des victimes à la justice
Il convient de noter que le matériel pédagogique n’est pas adapté aux besoins de chaque pays ; il comprend des cas génériques qui devront être adaptés au niveau local.
1. Obstacles pour les victimes de violence domestique (violences intrafamiliales en France)

La violence domestique ne prend pas toujours fin lorsque la victime s’échappe, tente de mettre fin à la relation et/ou demande de l’aide. Souvent, la violence s’intensifie parce que l’auteur sent qu’il perd le contrôle sur la victime. En fait, quitter l’auteur est le moment le plus dangereux pour une victime de violence domestique. Les raisons qui poussent la victime à rester avec son agresseur sont complexes et, dans la plupart des cas, fondées sur le fait que l’agresseur mettra ses menaces à exécution. La victime peut ne pas être en mesure de s’échapper en toute sécurité ou de protéger ceux qu’elle aime.1
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Les mêmes mécanismes de pouvoir et de contrôle qui contribuent à la perpétuation de la violence domestique empêchent les victimes de demander justice. La crainte de représailles de la part de l’auteur des violences, y compris les menaces d’abandonner les poursuites ou de n’accepter que des règlements injustes, peut être un obstacle pour les victimes qui cherchent à obtenir justice. Les auteurs peuvent en outre manipuler les victimes en les accusant d’avoir fait de fausses allégations ou en recourant au chantage affectif. Une victime de violence domestique sur quatre ne signale pas les incidents graves, principalement en raison de la peur, de la colère et de la honte.2 Trouvez plus d’informations sur les formes et dynamiques des VIF au sein du Module 1.
Leslie Morgan Steiner explique dans la vidéo suivante (en anglais, sous-titrage en 42 langues dont le français) pourquoi les victimes de violence domestique ne partent pas et corrige les idées fausses les plus répandues sur la violence domestique:
Les obstacles personnels, sociaux et culturels, sociétaux et juridiques suivants peuvent affecter l’accès à la justice à tous les niveaux:2
Merci de cliquer sur les croix pour obtenir plus d’informations.
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Groupes vulnérables et discrimination multiple
Les victimes de violence domestique viennent d’horizons très divers et sont confrontées à différents obstacles pour accéder à la justice. Souvent, elles n’ont pas confiance dans le système judiciaire, craignant d’être maltraitées ou de subir des attitudes dédaigneuses, ce qui entraîne une discrimination, une victimisation secondaire ou un conseil juridique inadéquat de la part des forces de l’ordre et des professionnels de la justice.Les groupes vulnérables désignent les personnes appartenant, ou perçues comme appartenant, à des groupes défavorisés ou marginalisés.3 Pour en savoir plus sur l’éventail diversifié des groupes de victimes voir notre Module 1.
La discrimination multiple est toute combinaison de formes de discrimination à l’encontre de personnes en raison du sexe, de l’origine raciale ou ethnique, de la religion ou des convictions, d’un handicap, de l’âge, de l’orientation sexuelle, de l’identité de genre ou d’autres caractéristiques. Cette discrimination peut être subie par les personnes qui ont, ou qui sont perçues comme ayant, ces caractéristiques.4 La discrimination intersectionnelle se produit sur la base de plusieurs motifs personnels ou caractéristiques / identités, qui fonctionnent et interagissent simultanément de manière à être inséparables.5
La vidéo suivante (en anglais sous-titrée en anglais) illustre les associations sociales négatives avec le genre:
Les stéréotypes raciaux peuvent diminuer l’image de soi et la valeur des individus, ce qui fait qu’il est encore plus difficile pour les victimes de violence domestique de chercher de l’aide et du soutien. La vidéo suivante (en anglais sous-titrée en anglais) recrée une célèbre expérience menée dans les années 1940 aux États-Unis sur les préjugés, la discrimination et la ségrégation raciale:
Blâme des victimes
Les attitudes, les croyances et les modèles de comportement jouent un rôle important dans le travail avec les victimes de violence domestique. Les attitudes de blâme de la victime, fondées sur des stéréotypes et des biais inconscients, marginalisent la victime et font qu’il est plus difficile de se manifester et de dénoncer la violence.
La culpabilisation des victimes et les attitudes discriminatoires des professionnels de la justice ont un impact significatif sur le signalement, les poursuites et les condamnations dans les cas de violence domestique. Des études ont montré que de telles attitudes peuvent conduire à un manque d’empathie à l’égard des victimes, les amenant à ne pas être crues, voire à être blâmées pour les violences qu’elles ont subies. 7 Il peut en résulter un retard dans le signalement des faits et un manque de confiance dans le système judiciaire. En outre, les attitudes de blâme de la victime peuvent conduire à une victimisation secondaire, où les victimes se sentent à nouveau traumatisées par la réponse qu’elles reçoivent lorsqu’elles cherchent de l’aide. Dans les procédures judiciaires, le blâme de la victime peut également se manifester sous la forme d’une indulgence à l’égard des délinquants, qui sont perçus comme moins coupables de leurs actes. Les stéréotypes compliquent encore le traitement des cas de violence domestique car les hypothèses sur le comportement ou les motivations de la victime peuvent conduire à une prise de décision biaisée.
Pour résoudre ces problèmes et améliorer le traitement des cas de violence domestique, il est essentiel que les professionnels du droit reçoivent une formation complète sur des sujets tels que le blâme de la victime et les stéréotypes.
Recommandations pratiques à l’intention des professionnels de la justice pour prévenir le blâme des victimes
- Écouter activement les victimes sans les juger et valider leurs expériences. Évitez de remettre en question leurs actions ou leurs comportements d’une manière qui pourrait involontairement blâmer la victime. Par exemple, lorsqu’une victime décrit son expérience, cherchez à comprendre son point de vue plutôt qu’à blâmer ses décisions.
- Dans les procédures judiciaires, utilisez un langage neutre qui ne perpétue pas les stéréotypes. Au lieu de demander « Pourquoi n’êtes-vous pas parti? », posez des questions ouvertes qui explorent les complexités de la situation de la victime, telles que « Pouvez-vous m’en dire plus sur les difficultés que vous avez rencontrées en cherchant de l’aide? ». En savoir plus sur la communication avec les victimes de violence domestique dans le Module 3.
- Participer à des ateliers et à des séances de formation sur la compréhension des soins tenant compte des traumatismes et sur l’impact des attitudes de blâme de la victime. Ces sessions devraient souligner l’importance de soutenir les victimes et de reconnaître la dynamique du pouvoir et du contrôle dans les relations abusives.
- Reconnaître les différences culturelles et respecter les divers milieux. Fournissez des interprètes si nécessaire et comprenez que les normes culturelles peuvent influencer la manière dont les victimes perçoivent la violence et y réagissent. La sensibilité culturelle permet d’apporter un soutien approprié et respectueux à toutes les victimes.
- Collaborer avec les services d’aide aux victimes et les organisations de défense des droits. Cette collaboration permet aux victimes de bénéficier d’un soutien complet tout au long de la procédure judiciaire, ce qui réduit la probabilité d’une victimisation secondaire. La mise en place de réseaux solides avec les services d’aide peut aider les victimes à s’orienter plus efficacement dans le système juridique.
En savoir plus sur les stéréotypes et les biais inconscients en consultant notre Module 8.
Victimisation secondaire
On parle de victimisation secondaire lorsque la victime subit un préjudice supplémentaire qui n’est pas le résultat direct de l’acte criminel mais qui est dû à la manière dont les institutions et d’autres personnes traitent la victime. Elle peut être causée, par exemple, par l’exposition répétée de la victime à l’auteur de l’infraction, par des interrogatoires répétés sur les mêmes faits, par l’utilisation d’un langage inapproprié ou par des commentaires insensibles de la part de toutes les personnes en contact avec les victimes.6
Pour prévenir la victimisation secondaire, les professionnels de la justice doivent adopter une approche sensible et empathique. La manière dont les professionnels de la justice mènent les entretiens au cours des procédures judiciaires influe grandement sur la volonté de la victime de coopérer. Témoigner devant un tribunal peut être particulièrement pénible et intimidant pour les victimes de violence domestique en raison de la nature intime de la violence. Elles peuvent ressentir un manque de contrôle, de la honte, de la peur de l’auteur des violences et de l’intimidation de la part du tribunal, et ne pas être disposées à se remémorer à plusieurs reprises des événements traumatisants. Si la victime se sent en sécurité, entendue et crue, elle sera plus encline à fournir les informations nécessaires au dossier.
Recommandations pratiques à l’intention des professionnels de la justice pour prévenir la victimisation secondaire
- Veiller à ce que la victime ne soit pas confrontée à l’auteur de l’infraction au cours de la procédure judiciaire. Utiliser des salles d’attente séparées et envisager des témoignages vidéo pour éviter tout contact direct.
- Offrir un cadre favorable et privé pour les entretiens et les témoignages afin d’aider la victime à se sentir en sécurité et à l’aise.
- Éviter les interrogatoires répétés sur les mêmes faits. Se coordonner avec les autres professionnels concernés pour veiller à ce que les informations soient recueillies et partagées de manière appropriée.
- Préparer soigneusement les entretiens afin d’éviter que la victime n’ait à raconter plusieurs fois ses expériences traumatisantes.
- Être attentif au langage utilisé lors des interactions. Éviter toute terminologie qui pourrait être perçue comme une accusation ou un jugement.
- Utiliser un langage empathique et encourageant pour aider la victime à se sentir comprise et respectée.
- Utiliser un langage clair et simple pour que la victime puisse comprendre facilement ce qui lui est communiqué. Plus d’informations sur la communication avec les victimes de violence domestique au sein du Module 3.
- Après avoir expliqué les procédures légales ou donné des instructions, demander à la victime si elle a compris et lui donner la possibilité de poser des questions.
- Fournir à la victime des instructions et des lignes directrices écrites, résumant les informations importantes discutées. Cela permet de renforcer la compréhension et donne à la victime une référence à laquelle elle peut revenir.
- Confirmer la compréhension en demandant à la victime de résumer ce qui a été discuté.
- Offrir l’accès à des services d’aide aux victimes, tels que des services de conseil et de défense juridique, tout au long de la procédure judiciaire.
- Permettre à la victime d’avoir une personne de confiance présente lors des entretiens et de la procédure judiciaire.
- Comprendre l’impact du traumatisme sur la mémoire et le comportement. Reconnaître que les incohérences dans le récit de la victime peuvent être le résultat d’un traumatisme et non d’une malhonnêteté.
- Former tous les professionnels de la justice aux pratiques tenant compte des traumatismes et à l’impact psychologique de la violence domestique.
- Donner à la victime le contrôle de certains aspects de la procédure, comme le choix du sexe de l’enquêteur ou la décision de faire des pauses pendant le témoignage.
- Veiller à ce que la victime soit pleinement informée de la procédure judiciaire et de ses droits, et l’impliquer dans la prise de décision chaque fois que cela est possible.
- Maintenir le professionnalisme et la confidentialité à tout moment. Éviter de faire des commentaires indélicats ou de montrer des signes non verbaux qui pourraient être interprétés comme de l’incrédulité ou un jugement.
- Faire preuve de patience et de compréhension, en reconnaissant que la victime peut être en proie à une détresse émotionnelle importante.
Regardez la vidéo suivante (en anglais sous-titrée en français) pour en savoir plus sur la violence sexiste, le blâme des victimes et la victimisation secondaire:
2. L’enquête7

Les enquêtes sur les cas de violence domestique requièrent une approche sensible et informée pour aborder les dynamiques complexes de pouvoir et de contrôle qui caractérisent la violence domestique. Elles comprennent une réponse immédiate, la conduite d’entretiens et l’évaluation du risque global pour la victime et ses enfants. Plus d’informations sur l’intervention de la police en cas de VIF voir notre Module 4 pour la Police.
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Réponse immédiate
Les enquêtes doivent être menées sans retard injustifié et de manière efficace, conformément aux principes énoncés dans la convention d’Istanbul. Cela signifie, par exemple, établir les faits pertinents, interroger tous les témoins disponibles et procéder à des examens médico-légaux fondés sur des méthodes d’enquête criminelle. Les mesures prises ne doivent pas compromettre les droits de la défense ou les normes d’un procès équitable. Plus d’informations sur la convention d’Istanbul dans notre Module 6.
Une réponse immédiate comprend:
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Mener des entretiens avec les victimes
Dans les cas de violence domestique, les déclarations de la victime et des témoins sont souvent les éléments de preuve les plus importants. Les victimes sont généralement plus disposées à faire des déclarations immédiatement après l’incident qu’après quelques jours. La déclaration de la victime est également importante pour l’évaluation immédiate des risques et la planification de la sécurité. Par conséquent, dans la mesure du possible, il faut s’efforcer d’interroger la victime immédiatement après l’incident.
Comment conduire un entretien
- Idéalement, la victime devrait pouvoir choisir le sexe de l’enquêteur.
- La victime doit pouvoir être accompagnée par quelqu’un, par exemple un travailleur social, pour bénéficier d’un soutien supplémentaire.
- L’entretien doit se dérouler dans une pièce calme, sans facteur perturbateur.
- Si la langue utilisée n’est pas la langue maternelle de la victime, un interprète doit être prévu. L’enquêteur doit informer la victime de son droit à disposer d’un traducteur et lui demander si elle le souhaite et si elle a des préférences quant au sexe, au dialecte et au pays d’origine du traducteur.
- L’enquêteur doit faire preuve de sensibilité et d’empathie tout au long de l’entretien.
- Il est important d’informer la victime de ses droits et de ses devoirs et de lui expliquer qu’il peut être nécessaire de poser des questions intimes et pourquoi c’est important. L’enquêteur doit expliquer que le fait de demander des détails, tels que ce que la victime a dit, fait ou porté, ne signifie pas qu’il faut blâmer la victime pour ce qu’elle a vécu, mais qu’il s’agit plutôt de recueillir autant d’informations que possible.
- L’enquêteur doit également aider la victime à réfuter tout reproche ou doute sur elle-même, éviter de porter des jugements de valeur et s’abstenir d’utiliser une terminologie spécialisée.
- Il faut prévoir suffisamment de temps pour l’entretien, en écoutant attentivement et en posant des questions ouvertes. L’enquêteur doit prendre des notes détaillées lorsqu’il parle à la victime, afin de ne pas avoir à revenir plusieurs fois sur l’histoire de la victime.
- L’enquêteur doit être prêt à gérer les réactions émotionnelles de la victime, comme les pleurs. Il peut être utile de demander à la victime si elle a besoin d’une pause si elle est bouleversée pendant l’entretien. Bien que les enquêteurs soient souvent soumis à des contraintes de temps, il est important d’être sensible à l’état émotionnel de la victime et de lui apporter le soutien nécessaire.
- Il faut parfois du temps et de nombreuses rencontres pour qu’une victime traumatisée révèle ses antécédents. L’enquêteur doit lui expliquer que son dossier juridique peut dépendre d’une divulgation aussi complète que possible. La victime doit pouvoir bénéficier d’un environnement sûr et d’opportunités de fournir des informations complètes sur ses antécédents.
Types of questions
Les informations suivantes doivent être demandées lors de l’entretien avec la victime:
- L’incident spécifique et les événements qui l’ont précédé
- La présence d’enfants
- La présence d’armes
- La description des violences physiques et psychologiques antérieures et des comportements de contrôle
- La description de l’auteur et de la relation de la victime avec lui
- L’impact de la violence sur la victime, y compris les blessures physiques et psychologiques, l’impact financier et les stratégies pour faire face à la violence
- Si vous pensez que la personne ne vous dit pas tout, essayez de lui demander de quoi elle a peur (parfois, ce n’est pas la chose la plus évidente)
- Posez des questions sur les témoins, tels que les voisins car leur témoignage peut renforcer les poursuites judiciaires
- Demandez si la victime envisage de se séparer car ce facteur est associé à un risque élevé et peut être un élément déclencheur des homicides.
Questionner un enfant
Il est important de reconnaître que la violence domestique a un impact sévère sur les enfants. Lorsque l’on aide des victimes ayant des enfants qui ont été témoins de violence domestique ou qui ont subi elles-mêmes des violences domestiques, il faut tenir compte des droits des enfants et de leur intérêt supérieur.
Les entretiens avec les enfants doivent comporter des interventions adaptées à leur âge et à leur stade de développement. Il peut s’agir de:
- Utiliser des questions narratives et ouvertes, ainsi que des questions spécifiques ou ciblées, mais non suggestives
- Éviter les questions fermées et explicites
- Utiliser une communication empathique, une écoute efficace et un questionnement habile.
3. Avant le procès8

La période précédant le procès représente un risque accru pour les victimes, en particulier si les auteurs ne sont pas détenus ou surveillés avant le procès. Les victimes peuvent faire l’objet de représailles et d’intimidations. Il est donc important d’évaluer et de gérer les risques pour la sécurité dans chaque cas, selon des procédures normalisées et en coopération avec d’autres organismes.
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Au cours de cette phase préalable au procès, différentes parties prenantes jouent un rôle crucial pour assurer la sécurité et le soutien de la victime. Les services répressifs doivent assurer une protection et surveiller les mouvements de l’auteur de l’infraction afin de prévenir toute menace ou tout acte de représailles. Les procureurs doivent donner la priorité à la sécurité de la victime lorsqu’ils négocient les conditions de la mise en liberté sous caution ou demandent des ordonnances de protection. Les services d’aide aux victimes et les refuges doivent être disponibles pour fournir une assistance immédiate et un hébergement sûr si nécessaire. En outre, les organisations d’aide juridique peuvent aider les victimes à s’orienter dans la procédure judiciaire et à défendre leurs droits devant les tribunaux. Les professionnels de la santé doivent être impliqués dans l’évaluation et la documentation de l’impact physique et psychologique de la violence domestique sur la victime.
Mesures de protection
Les options juridiques visant à assurer la sécurité des victimes peuvent inclure des conditions de mise en liberté sous caution, des ordonnances d’interdiction d’approcher, des ordonnances d’interdiction ou des ordonnances de protection. Ces mesures sont importantes non seulement pendant la phase préalable au procès, mais doivent également être réévaluées tout au long du procès en fonction de l’évolution des circonstances:
- Envisager la détention provisoire
- L’éloignement du domicile
- Maintenir une distance avec la victime
- Interdire tout contact avec la victime
- Limiter ou suspendre les visites des enfants
Recueil de preuves
La collecte des preuves relève principalement de la responsabilité des forces de l’ordre. Toutefois, les procureurs peuvent également être amenés à donner des directives sur les preuves nécessaires, les procédures à suivre pour obtenir des preuves recevables et évaluer si les preuves sont suffisantes pour mettre en examen l’auteur de l’infraction.
Commentaires spontanés
Lors de la première intervention des forces de l’ordre, tous les commentaires ou réactions significatifs liés à l’incident doivent être notés et documentés. Ces remarques peuvent être utilisées lors du procès, même si la victime refuse de faire une déclaration, et peuvent servir de preuves corroborantes si la crédibilité de la victime est mise en doute. Il est également important de noter les commentaires spontanés faits par d’autres témoins sur les lieux de l’incident.
Photographies des blessures de la victime
Les photos des blessures de la victime sont consignées dans le rapport de police. Ces photos peuvent être utilisées au tribunal comme preuves et contribuer à une condamnation, même si la victime ne témoigne pas, et peuvent être utilisées comme corroboration, si l’accusé nie l’infraction et qu’il s’agit d’une parole contre une autre.
Preuves d’atteintes psychologiques
Les victimes de violence domestique peuvent être confrontées à des interrogatoires répétés et intrusifs de la part de la défense, ce qui entraîne des confusions et des contradictions dues au stress émotionnel ou à des troubles médicaux tels que la dépression et le syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Ces troubles psychologiques peuvent servir d’indicateurs de l’intensité et des effets durables de la violence domestique.
Les témoignages d’experts peuvent clarifier la façon dont les traumatismes affectent la mémoire et le délai de révélation et expliquer les blessures psychologiques par opposition aux blessures physiques.
Preuves médicales
La collecte de preuves médicales et médico-légales, telles que les blessures et l’analyse de l’ADN, est un devoir des autorités publiques et peut contribuer à une condamnation même sans le témoignage de la victime. Toutefois, l’obtention d’un consentement valable de la victime est nécessaire pour les examens médicaux. Les victimes de violences sexuelles devraient se voir proposer immédiatement des examens par du personnel médical spécialisé, avec des explications sur les avantages d’obtenir un consentement éclairé. La collecte immédiate de preuves médicales est cruciale car les traces peuvent disparaître en peu de temps, souvent dans les trois jours. Plus d’informations sur l’évaluation médicale et l’obtention de preuves voir notre Module 4 pour le secteur de la santé.
L’absence de preuves médicales ou physiques ne doit pas empêcher l’enquête ou l’inculpation, ni miner la crédibilité de la victime. Le témoignage d’un expert sur les blessures physiques et psychologiques subies lors d’actes de violence antérieurs peut également être bénéfique et renforcer le dossier de la victime et sa crédibilité.
Témoins
Les témoins ne se limitent pas aux témoins oculaires. De nombreuses autres personnes peuvent détenir des informations précieuses pour l’affaire, par exemple:
- Les voisins qui ont entendu des discussions ou des bagarres.
- Les amis à qui l’on a confié l’incident.
- Les enseignants qui ont été informés de ce qui s’est passé.
La police doit activement enquêter sur les personnes à qui la victime a pu se confier. En élargissant le champ d’investigation au-delà du témoignage de la victime et en prenant en compte tous les témoins potentiels, l’enquête peut mettre au jour davantage d’éléments permettant de prouver ce qui s’est passé. Plus d’informations sur les témoins extérieurs des VIF dans le Module 2.
4. Procès9

Les victimes qui se sentent soutenues et traitées avec respect sont plus susceptibles de continuer à coopérer avec les autorités judiciaires. Il est important de préparer la victime au procès afin d’éviter qu’elle ne soit réticente à témoigner.
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Le fait de tenir la victime bien informée de la procédure, de son déroulement et de son issue potentielle, et de lui expliquer son rôle, peut contribuer à minimiser le risque qu’elle décide de ne pas engager de poursuites ou de soutenir l’accusation. Dans certains cas, les victimes peuvent néanmoins décider de retirer leur soutien aux poursuites.
Si une victime choisit de retirer son soutien, les procureurs doivent s’abstenir de la critiquer ou de la blâmer. Même si cela peut poser des problèmes à l’accusation, les poursuites peuvent toujours avoir lieu, du moins en ce qui concerne les infractions graves.
Rencontres avec les victimes
Les procédures standard pour les procureurs devraient inclure des réunions avec les victimes, avec des interprètes et des personnes de soutien si nécessaire. Au cours de ces réunions, les procureurs peuvent:
- Établir une relation avec la victime et la rassurer sur le fait que ses droits et ses besoins seront pris en considération.
- Discuter d’éventuelles mesures spéciales (par exemple, écrans, témoignage vidéo) pour le procès et répondre à toute préoccupation que la victime pourrait avoir concernant le soutien de l’accusation.
- Évaluer les risques actuels pour la victime et la manière dont les poursuites peuvent les affecter.
Poursuites
Le procureur doit décider de plusieurs actions cruciales: inculper l’auteur des faits, envisager un mode alternatif de résolution des conflits ou une médiation, ou encore abandonner les poursuites. Dans les cas de violence domestique, le fait de retarder l’action pourrait conduire à d’autres actes de violence, potentiellement plus graves, dans un avenir proche. Choisir d’abandonner les poursuites pourrait indiquer à l’auteur des faits que son comportement est acceptable.
Lorsqu’ils décident de poursuivre une affaire, les procureurs doivent évaluer s’il existe des preuves suffisantes, si une condamnation est probable et s’il y a un intérêt public à poursuivre l’affaire.
Preuves suffisantes
Dans les cas de violence domestique, le procureur doit généralement adopter une approche proactive en matière de collecte de preuves. Il s’agit notamment de collaborer avec les forces de l’ordre pour recueillir des éléments de preuve au cours de la phase d’enquête.
Probabilité de condamnation
La probabilité d’une condamnation est une considération importante mais elle ne doit pas l’emporter sur d’autres facteurs dans les cas de violence domestique. Les procureurs doivent enquêter avec diligence et rechercher d’autres sources de preuves lorsqu’ils procèdent sans le témoignage de la victime. Il peut s’agir de témoins concordants, de preuves médicales ou photographiques indépendantes et d’éléments de preuve provenant de la scène de crime.
Intérêt public
Pour déterminer s’il y a lieu d’engager des poursuites, les procureurs doivent évaluer l’intérêt public. Compte tenu de la prévalence de la violence domestique dans le monde et de son impact sur les victimes, sur les enfants concernés et sur la société dans son ensemble, il y a généralement un fort intérêt public à engager des poursuites.
Les facteurs qui influencent l’appréciation du procureur comprennent la gravité de l’infraction, la culpabilité du défendeur (comme les problèmes de santé mentale ou la préméditation et les menaces faites à la victime), les antécédents criminels, les circonstances entourant le préjudice (y compris tout antécédent de violence, l’utilisation d’armes et la présence d’enfants dans le ménage) et le fait que le délinquant était mineur au moment de l’infraction.
Charges
Le point culminant des étapes précédentes est la présentation des charges. Des affaires mal instruites conduisant à des accusations inappropriées peuvent empêcher une condamnation adéquate et éroder la confiance des victimes dans le système judiciaire.
Les procureurs doivent s’assurer que les charges:
- reflètent la gravité de l’infraction
- prévoient des peines et des mesures post-condamnation adéquates
- Présentent clairement l’affaire
- Reflètent l’impact sur la victime.
Soutien des services sociaux
Les services sociaux et les organisations de victimes, y compris les conseillers spécialisés dans la violence domestique, peuvent aider et soutenir les victimes au cours des enquêtes et des procédures judiciaires. Leur soutien n’est pas juridique et se concentre sur la préparation émotionnelle des victimes au tribunal, sur leur accompagnement pendant la procédure et sur l’offre d’une assistance pratique. Les victimes soutenues par ces services sont plus susceptibles de porter plainte, de témoigner et de contribuer à l’issue de la procédure.
Dans la salle d’audience
À tous les stades de l’enquête et de la procédure judiciaire, des mesures de protection devraient être mises en place pour faciliter l’expérience du procès pour les victimes et faciliter leur témoignage. De cette manière, les procédures judiciaires peuvent potentiellement contribuer à la guérison et à l’autonomisation des victimes, au lieu de les traumatiser davantage.
Juge
Au cours des procédures judiciaires, les juges jouent un rôle important dans la protection de l’identité et de la confidentialité de la victime. Ils peuvent interdire la divulgation de l’identité de la victime à des tiers et veiller à ce que les informations confidentielles ne soient pas divulguées dans les archives publiques et les médias. Les juges peuvent également faciliter les procédures à huis clos, lorsque certaines parties ou la totalité du procès, comme le témoignage de la victime, se déroulent à huis clos. En outre, les juges peuvent autoriser des pauses en fonction des besoins et du bien-être de toutes les parties impliquées dans la procédure.
Victime
Au cours de la procédure judiciaire, diverses mesures peuvent être mises en œuvre pour soutenir et protéger la victime. Il peut s’agir de permettre à la victime d’utiliser un pseudonyme pour protéger son identité, de lui offrir la possibilité de témoigner sans être physiquement présente ou derrière un écran. Des mesures de protection spéciales devraient être étendues aux enfants victimes / témoins afin de garantir que les procédures sont conformes à leur intérêt supérieur. Une aide juridique et des interprètes devraient être disponibles pour aider la victime à s’orienter dans la procédure judiciaire. En outre, les services sociaux, les conseillers et les ONG peuvent apporter leur soutien à la victime afin de lui donner les moyens d’agir tout au long de la procédure judiciaire.
Avocat
Les avocats doivent respecter des lignes directrices spécifiques lorsqu’ils interrogent les victimes dans le cadre d’une procédure judiciaire. Il s’agit, par exemple, d’interdire les questions sur l’histoire et le comportement sexuels à moins qu’elles ne soient strictement pertinentes et nécessaires à l’affaire. Il est important d’éviter de blâmer la victime ou d’utiliser un langage insensible pendant l’interrogatoire et de limiter la fréquence, la manière et la durée du processus d’interrogation. En outre, les avocats doivent réduire au minimum la nécessité pour les victimes de témoigner à plusieurs reprises.
Auteur présumé
Lorsque l’on aborde le rôle des auteurs dans les procédures judiciaires, plusieurs mesures de protection peuvent être mises en œuvre pour les victimes. Il s’agit notamment d’envisager le recours à des intermédiaires pour faciliter l’interrogatoire des témoins, de prendre des mesures pour empêcher le contact entre la victime et l’auteur de l’infraction, par exemple en prévoyant des zones d’attente séparées, des escortes, des entrées et sorties distinctes et d’autoriser les témoins à déposer en l’absence de l’auteur de l’infraction, par exemple à l’aide de technologies appropriées telles que la preuve vidéo.
Expert
Les experts peuvent fournir des informations importantes (par exemple, sur la dynamique de la violence domestique et le comportement de la victime) au juge et l’aider à évaluer la crédibilité du témoignage. Des informations précises peuvent réduire le risque que le juge se forge des opinions partiales basées sur des mythes ou des malentendus et conduire à des décisions éclairées.
Délais et prescriptions
La victime et l’accusé ont tous deux droit à un procès sans retard injustifié.
Délai
Les retards dans la conduite des procès pour violence domestique peuvent accroître le risque de vengeance contre la victime, en particulier si l’auteur n’est pas en détention préventive. Ils peuvent également accroître l’incertitude et la peur de la victime quant à l’issue du procès. Une réponse immédiate est importante pour protéger les victimes et prévenir d’autres infractions. Toutefois, les victimes ne doivent pas se sentir obligées de suivre la procédure si rapidement qu’elles ne se sentent pas prises au sérieux et/ou qu’elles éprouvent des sentiments négatifs qui les amènent à retirer leur plainte.
Prescription
Il est important de tenir compte des délais de prescription dans les cas de violence domestique, en particulier lorsque les victimes tardent à signaler les infractions. Lorsque les délais sont proches de l’expiration, les autorités chargées de l’application de la loi doivent agir avec une célérité particulière. En général, les délais de prescription devraient être adéquats et proportionnels à la gravité de l’infraction.
Pouvoir discrétionnaire du juge
Les juges jouent un rôle crucial dans la réponse du système judiciaire à la violence domestique car ils sont généralement l’autorité de dernière instance dans les affaires civiles et pénales. Leurs décisions ont un impact sur la victime, l’auteur et leurs enfants. Ils peuvent établir des politiques et des procédures dans les salles d’audience afin de créer un environnement sûr pour les victimes et de faciliter leur accès aux tribunaux:
- Comprendre la dynamique de la violence domestique, les risques encourus par les victimes et leurs enfants, et les schémas de violence
- Traiter les victimes avec courtoisie, compassion, dignité et sensibilité, même si elles ne sont pas présentes
- Prendre en compte la sécurité des victimes et des enfants à tous les niveaux et à tout moment
- Tirer parti de toutes les ressources disponibles qui offrent sécurité et soutien aux victimes
- Prendre en compte les besoins de la victime et les circonstances spécifiques de chaque affaire
- Prendre le temps d’expliquer la procédure, en particulier les différentes étapes du processus, dans une langue que la victime peut comprendre.
Le pouvoir discrétionnaire des juges est important dans les cas de violence domestique en raison de la dynamique complexe de la violence, que les lois seules ne peuvent pas traiter. Toutefois, les décisions judiciaires sont influencées par les croyances et les perceptions des juges en matière de violence domestique. Les idées fausses peuvent compromettre la sécurité de la victime et la responsabilité de l’auteur de la violence. Les stéréotypes judiciaires, lorsque les décisions sont fondées sur des croyances plutôt que sur des preuves factuelles, peuvent gravement nuire à l’accès des victimes à la justice.
La neutralité et l’impartialité des juges sont fondamentales pour un procès équitable et l’accès à la justice. Bien qu’une neutralité totale soit impossible, les juges doivent s’efforcer de garder une certaine distance par rapport à leurs propres croyances et opinions, en se concentrant sur les faits et le dossier. L’examen de ses propres convictions peut aider le juge à développer sa neutralité et son impartialité.
Condamnation
L’objectif premier de la détermination de la peine est de mettre fin à la violence, de protéger la victime, de tenir l’auteur responsable de ses actes et d’avoir un effet dissuasif général.
Il convient de tenir compte des exigences suivantes en matière de détermination de la peine:
- L’information: Disposez-vous de toutes les informations nécessaires pour prononcer une sentence appropriée?
- Évaluation du risque: Avez-vous pris en compte la dangerosité de l’auteur de l’infraction?
- Témoignage de la victime: Avez-vous entendu la victime au moment de la condamnation?
- Autres facteurs: Avez-vous pris en compte des facteurs tels que la nature et la gravité de l’infraction, les antécédents de violence, les efforts antérieurs de réinsertion, le caractère de l’accusé et ses besoins actuels en matière de réinsertion ainsi que les intérêts de la communauté en matière de protection et de punition?
Les infractions doivent être passibles de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives, compte tenu de leur gravité. Il peut s’agir de peines privatives de liberté, pouvant conduire à l’extradition. D’autres mesures, telles que le suivi ou la surveillance des personnes condamnées et le retrait des droits parentaux (en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant), peuvent être adoptées. Garantir le contact avec le parent violent peut non seulement avoir un impact négatif sur l’enfant, mais aussi constituer un risque sérieux pour la sécurité de la victime, car cela donne souvent à l’auteur de l’infraction une raison de contacter ou de voir la victime et peut ne pas être conforme à une ordonnance de restriction ou d’interdiction en vigueur. Dans le cadre de la condamnation, les auteurs pourraient être tenus de participer à des programmes d’intervention visant à examiner leur comportement et leur potentiel de réadaptation, notamment en ce qui concerne leur droit de contacter des enfants. Ces programmes peuvent être cruciaux pour déterminer si et dans quelles conditions les contacts avec les enfants sont sûrs et appropriés, en accord avec les mesures de protection de la victime et du bien-être des enfants.
Circonstances aggravantes
Les juges devraient également tenir compte des facteurs aggravants lorsqu’ils déterminent la peine à infliger pour une infraction, conformément aux dispositions pertinentes du droit national.
Un certain nombre de situations permettent d’envisager des peines plus lourdes dans les cas de violence domestique.
Auteur
- Répétition d’infractions
- Abus de pouvoir
- Infraction commise par deux ou plusieurs personnes agissant ensemble
- Infraction commise avec l’utilisation ou la menace d’une arme
- Infraction précédée ou accompagnée d’une extrême violence
- L’auteur a déjà fait l’objet de condamnations de même nature.
Victime
- Infraction commise à l’encontre d’une personne rendue vulnérable par des circonstances particulières
- Infraction commise à l’encontre ou en présence d’un enfant
- L’infraction a entraîné un préjudice physique ou psychologique grave pour la victime.
Facteurs d’atténuation
Outre les facteurs aggravants, il convient d’accorder une attention particulière aux facteurs atténuants. Dans de nombreux systèmes juridiques, les aveux sont considérés comme une circonstance atténuante dans les affaires de violence domestique. Toutefois, les tribunaux doivent soigneusement évaluer les remords de l’auteur de l’infraction par rapport à la gravité de l’infraction.
Plutôt que de considérer automatiquement l’expression de remords comme une circonstance atténuante, les tribunaux doivent tenir compte des antécédents de violence et de la persistance ou non de la violence ou des comportements menaçants. Si la violence se poursuit, les remords peuvent être considérés comme un geste malhonnête de la part de l’auteur et non comme une circonstance atténuante valable.
5. Poursuites civiles10

Les recours civils garantissent que les victimes peuvent demander un recours civil adéquat contre les auteurs d’infractions. Il s’agit notamment d’injonctions prononcées par les tribunaux pour faire cesser ou empêcher certains comportements ou pour contraindre à des actions spécifiques. La législation nationale peut également prévoir des recours plus spécifiques tels que des ordonnances d’interdiction et des ordonnances de restriction, particulièrement pertinentes dans les cas de violence domestique. Ces mesures complètent la protection immédiate et souvent à court terme des ordonnances de protection d’urgence.
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Ordonnances de restriction
Les ordonnances restrictives sont des mesures juridiques importantes qui offrent un recours juridique rapide pour prévenir d’autres violences et protéger les victimes. Ces mesures, qui ont le même objectif, peuvent être connues sous différents noms, tels qu’ordonnance de protection, ordonnance d’expulsion, ordonnance de protection ou injonction.
Les ordonnances de protection doivent être:
- Disponibles pour une protection immédiate et sans charge financière ou administrative indue pour la victime
- Délivrées pour une période déterminée
- Le cas échéant, délivrées sur une base ex parte avec effet immédiat
- Disponibles indépendamment ou en complément d’autres procédures judiciaires
- Peuvent être introduites dans une procédure judiciaire ultérieure.
Ordonnances d’interdiction
Les ordonnances d’interdiction peuvent être un moyen efficace de prévenir d’autres actes de violence et d’assurer la sécurité de la victime dans des situations de danger immédiat. Les autorités doivent tenir compte du grave danger pour la victime et de l’urgence de ces ordonnances, qui nécessitent souvent une décision sans entendre les deux parties. Cela se justifie par le fait que ces décisions sont généralement temporaires et que d’autres recours peuvent protéger les intérêts de l’auteur présumé de l’infraction.
La considération en faveur ou à l’encontre d’une ordonnance d’interdiction doit être déterminée par la pondération différente des intérêts opposés: Que se passerait-il si la décision contre l’interdiction d’exercer était erronée? Et d’un autre côté: Que se passerait-il si la décision en faveur d’une interdiction d’exercer était erronée?
Injonctions
Les injonctions de droit civil comprennent d’autres mesures visant à protéger les victimes de la violence. Par exemple, un juge peut interdire l’accès aux armes, aux drogues ou à l’alcool ou, dans les cas de mariage forcé, exiger que l’auteur présumé de l’infraction remette son passeport (suivant les différentes législations nationales).
Tribunal des affaires familiales
Dans les tribunaux des affaires familiales, les décisions dépendent de la crédibilité, en particulier dans les cas de violence domestique. Il est donc important de comprendre la dynamique sous-jacente et de reconnaître les risques des décisions pour les victimes de violence domestique.
Les victimes de violence domestique souffrent souvent de troubles psychologiques sévères, qui peuvent injustement influencer les décisions relatives à la garde des enfants en faveur du partenaire violent, qui peut sembler plus stable pour s’occuper des enfants. Cette situation peut se produire même si les enfants sont témoins du comportement abusif. Les juges doivent être conscients de cette dynamique et de la possibilité pour les auteurs de manipuler les perceptions de compétence.
En outre, les auteurs de violences invoquent souvent l’aliénation parentale, alléguant que la victime aliène intentionnellement les enfants. Ces tactiques sont couramment utilisées dans les procédures des tribunaux aux affaires familiales. Les juges doivent être vigilants à l’égard des tactiques de manipulation de la part des auteurs de violence, qui se poursuivent même dans un cadre juridique. Permettre aux auteurs de voir leurs enfants et de les contrôler revient souvent à maintenir le contrôle sur la victime. Par conséquent, les procédures judiciaires doivent donner la priorité à la restauration du contrôle des victimes sur leur vie.
La violence domestique commence ou s’intensifie souvent lors de séparation ou de divorce. Les juges doivent donc examiner les affaires de droit de la famille affectées par la violence domestique afin d’éviter que la victime ne subisse d’autres préjudices. Dans de telles situations, il convient d’envisager d’offrir à la victime une aide juridique, de donner la priorité à l’affaire et de l’accélérer.
Droits de garde et de visite
La violence domestique est un facteur important dans la détermination de la garde des enfants et des droits de visite par le tribunal. Si les incidents de violence domestique ne sont pas pris en compte par les autorités judiciaires lorsqu’elles déterminent la garde des enfants ou les droits de visite, la victime et les enfants peuvent être exposés à un risque supplémentaire, ce qui permet à l’auteur des violences d’avoir accès à la victime et aux enfants et de poursuivre son comportement violent.
Dans les cas de violence domestique, les enfants représentent souvent le seul lien existant entre la victime et l’auteur des violences. Pour de nombreuses victimes et leurs enfants, le respect des ordonnances de visite pose de sérieux problèmes de sécurité. Dans de tels cas, le tribunal devrait imposer des visites surveillées avec l’auteur des violences, généralement facilitées par les services sociaux ou une autre tierce partie.
Étude de cas: Violence domestique et droit de garde
Sophia est victime de violence domestique depuis plusieurs années de la part de son mari, Michael. Michael a des antécédents de comportement violent, il a fait l’objet de plusieurs rapports de police et d’une ordonnance restrictive. Sophia et Michael ont un fils de 5 ans, Ethan. Récemment, Sophia a demandé le divorce et la garde complète d’Ethan, citant le comportement violent de Michael comme une préoccupation majeure.
Michael demande au tribunal des affaires familiales un droit de visite pour Ethan. Sophia est très inquiète du risque potentiel pour elle et son fils si Michael obtient un droit de visite. Le tribunal doit maintenant décider si Michael doit être autorisé à avoir des contacts avec Ethan et dans quelles conditions.
Pistes de réflexion
(1) Quelles mesures le tribunal peut-il prendre pour assurer la sécurité de Sophia et d’Ethan pendant les visites éventuelles de Michael?
(2) Quels types de preuves et de témoignages Sophia devrait-elle présenter au tribunal pour étayer son opposition à la demande de droit de visite de Michael?
(3) De quelle manière le tribunal peut-il évaluer le bien-être et la sécurité d’Ethan en décidant des droits de visite, en particulier en tenant compte de son âge et de l’impact psychologique potentiel d’avoir été témoin de violence domestique?
(4) Quels principes juridiques ou lignes directrices le tribunal devrait-il suivre pour déterminer les droits de visite dans les cas de violence domestique?
(5) Comment les préoccupations de Sophia concernant sa sécurité et celle d’Ethan peuvent-elles être prises en compte par le tribunal au cours de la procédure judiciaire?
(6) Quels services et ressources de soutien peuvent être offerts à Sophia et Ethan pour les aider à faire face aux effets émotionnels et psychologiques de la violence domestique et de la procédure judiciaire en cours?
Exemples
(1) Le tribunal doit donner la priorité à la sécurité et au bien-être de Sophia et Ethan. Compte tenu des antécédents de violence de Michael, des visites surveillées dans un environnement contrôlé devraient être envisagées pour assurer leur protection.
(2) Sophia devrait présenter les rapports de police documentant les incidents de violence, les dossiers médicaux si des blessures sont survenues et tout témoignage de personnes ayant observé la violence.
(3) Le tribunal pourrait désigner un psychologue pour enfants afin d’évaluer l’état émotionnel et psychologique d’Ethan, compte tenu de son âge et du traumatisme potentiel lié à l’exposition à la violence domestique.
(4) Les droits de visite doivent être accordés avec prudence dans les cas de violence domestique, la principale préoccupation étant la sécurité de l’enfant. Dans de telles situations, le tribunal devrait donner la priorité à la protection contre les préjudices plutôt qu’au droit de visite des parents.
(5) Les préoccupations de Sophia concernant sa sécurité et celle d’Ethan doivent être prises au sérieux par le tribunal. Le juge doit permettre à Sophia d’exprimer ses craintes et de présenter des preuves à l’appui de ses préoccupations.
(6) Des services de soutien tels que des conseils en cas de traumatisme, une assistance juridique et l’accès à des refuges doivent être proposés à Sophia et Ethan pour les aider à faire face aux effets émotionnels et psychologiques de la violence domestique et à naviguer dans les complexités de la procédure judiciaire.
Indemnisation
Les droits à indemnisation des victimes, dans le cadre de procédures pénales et civiles, visent à réparer les dommages physiques et psychologiques ainsi que d’autres effets émotionnels tels que la peur, la souffrance et le stress. Les tribunaux doivent évaluer ces dommages en tenant compte des preuves médicales.
La responsabilité première de l’indemnisation incombe à l’auteur de l’infraction mais les victimes peuvent également demander une indemnisation auprès de compagnies d’assurance ou de programmes financés par l’État. Dans les cas où les auteurs ne sont pas en mesure de payer ou sont inconnus, les obligations de l’État peuvent s’appliquer en vertu de lois internes afin de garantir l’indemnisation des victimes.
6. Médiation11

La médiation victime-délinquant en droit pénal est disponible dans certaines juridictions pour permettre à la victime et au délinquant de discuter de l’infraction d’une manière structurée et médiatisée. L’objectif est que l’auteur de l’infraction assume la responsabilité de ses actes et que la victime puisse tourner la page. Les partisans de la médiation dans les affaires familiales affirment que ces méthodes contribuent à préserver les relations familiales importantes et à réduire l’impact traumatique d’une rupture familiale sur les enfants.
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Toutefois, la médiation présente des risques, en particulier dans les cas de violence domestique:
- La médiation peut conduire à penser que la violence domestique est une affaire privée.
- Le consentement de la victime peut être contraint par des menaces ou la crainte d’un témoignage devant le tribunal.
- La sécurité de la victime peut être gravement menacée.
- L’auteur des violences peut utiliser la médiation pour intimider davantage la victime.
- La victime peut accepter des règlements défavorables sur des questions essentielles telles que le divorce, la garde des enfants et les biens.
Une évaluation approfondie des risques doit être effectuée avant d’envisager une médiation volontaire.
Sources
- A Woman’s Place. 2020. Barriers to Leaving. https://www.awpdv.org/barriers-to-leaving.html ↩︎
- A Woman’s Place. 2020. Barriers to Leaving. https://www.awpdv.org/barriers-to-leaving.html ↩︎
- European Institute for Gender Equality (EIGE). 2016. Vulnerable groups. https://eige.europa.eu/publications-resources/thesaurus/terms/1453 ↩︎
- European Institute for Gender Equality (EIGE). 2016. Multiple discrimination. https://eige.europa.eu/publications-resources/thesaurus/terms/1069 ↩︎
- European Institute for Gender Equality (EIGE). 2016. Intersectional discrimination. https://eige.europa.eu/publications-resources/thesaurus/terms/1395 ↩︎
- European Institute for Gender Equality (EIGE). 2016. Secondary victimisation. https://eige.europa.eu/publications-resources/thesaurus/terms/1248 ↩︎
- Council of Europe (CoE). 2017. Human Rights Education for Legal Professionals (HELP). Violence Against Women and Domestic Violence. Criminal Justice Response I: Investigation and Pre-trial. https://help.elearning.ext.coe.int/enrol/index.php?id=2112 ↩︎
- Council of Europe (CoE). 2017. Human Rights Education for Legal Professionals (HELP). Violence Against Women and Domestic Violence. Criminal Justice Response I: Investigation and Pre-trial. https://help.elearning.ext.coe.int/enrol/index.php?id=2112 ↩︎
- Council of Europe (CoE). 2017. Human Rights Education for Legal Professionals (HELP). Violence Against Women and Domestic Violence. Criminal Justice Response II: Trial and Sentencing. https://help.elearning.ext.coe.int/enrol/index.php?id=2112 ↩︎
- Council of Europe (CoE). 2017. Human Rights Education for Legal Professionals (HELP). Violence Against Women and Domestic Violence. Criminal Justice Response II: Trial and Sentencing. Civil Justice Response. https://help.elearning.ext.coe.int/enrol/index.php?id=2112 ↩︎
- Council of Europe (CoE). 2017. Human Rights Education for Legal Professionals (HELP). Violence Against Women and Domestic Violence. Alternative Dispute Resolution. https://help.elearning.ext.coe.int/enrol/index.php?id=2112 ↩︎